Les mots sont les armes du pouvoir, des armes bien plus redoutables que des fusils ou des canons pour obtenir le consentement du peuple. Et une fois obtenu, le peuple s’en contente. J’ai pris l’exemple de l’abeille, car c’est sans nul doute l’animal qui incarne le plus la biodiversité aux côtés du papillon, du tigre, de l’éléphant, du loup… Depuis 2018, le ver de terre tente d’entrer dans ce panthéon, mais est-ce vraiment cela la biodiversité ? Non
Cette semaine, les bras m’en sont tombés en lisant les propos de ce lanceur d’alerte : « Biodiversité. Aujourd’hui, l’espèce que l’on doit protéger, c’est l’homme », alerte Yann Arthus-Bertrand. » FranceInfo le 22/05/2023. Pourquoi devrions-nous protéger l’espèce qui prolifère sur la planète, détruit les écosystèmes et pollue l’eau potable ? Cet homme d’affaires a fait fortune avec ses images de la Nature vues du ciel, peut-être l’a-t-il toujours vue de trop loin ? Il dit être porteur d’une écologie bienveillante, tout en ayant soutenu la Coupe du Monde de football au Qatar (source) et justifié l’inaction climatique des politiques (source). De plus, il est membre du Conseil d’administration de LVMH, le leader mondial du luxe. Sa position rejoint celle de l’ancien Premier ministre LR, Édouard Philippe, qui vantait en 2019 une écologie souriante (source), l’écologie qui sourit toujours aux mêmes.
« Non à la biodiversité,
on nous empêche de travailler »
C’était le slogan de plusieurs manifestations d’agriculteurs radicaux en 2014. Ils réclamaient la libéralisation de l’usage des pesticides et l’assouplissement des normes environnementales. Une idée plus que jamais d’actualité… La biodiversité, leur bête noire.
Certains considèrent même les pesticides comme des protecteurs de l’environnement, à l’instar du journal l’Opinion le 19/09/2019 : Les pesticides, « est-ce mal ? Non. Cela évite de devoir déforester pour augmenter les surfaces cultivées. » Le journal va jusqu’à expliquer que certains pesticides protègent la santé humaine… En décembre 2018, c’était la célèbre revue scientifique Nature qui les célébrait, soutenant que les pesticides sont meilleurs pour le climat que l’agriculture bio… Les chercheurs sont allés jusqu’à écrire que le bio encourage la déforestation. (extrait de l’Éloge du ver de terre, tome 2)
Soyons clairs, nets et précis. Comme son nom l’indique, un insecticide sert à tuer les insectes. Et par ricochet, il tue ceux qui se nourrissent des insectes empoisonnés, en particulier les oiseaux. Or, la toxicité d’un insecticide est évaluée sur 2 oiseaux parmi les 10 000 espèces terrestres (ou 18 000 selon cette source). Seulement 2…
De plus, 2 espèces inconnues dans les champs agricoles : l’une vivant dans l’eau, l’autre dans les prairies désertiques. Au total, l’impact toxique des pesticides est évalué sur moins de 12 espèces animales censées représenter l’ensemble de la diversité biologique : la biodiversité. Les protocoles d’homologation sont totalement HS. Lire : Les pesticides ont plus de droits que la Nature ! J’espère que vous commencez à saisir le sens de mon titre. Continuons.
L’abeille n’est pas une espèce
Pour illustrer la biodiversité, les publicitaires utilisent souvent l’image d’une abeille qui n’existe pas dans la Nature ! Une abeille de culture, fruit d’hybridations, sélectionnée pour produire un maximum de miel, tout comme la vache Prim’Holstein pour pisser du lait ou le cheval de course pour remplir les poches de ses actionnaires. Alors, tout le monde a fini par croire que cette espèce, artificielle, était la reine de la biodiversité. En réalité, rien qu’en France, la famille des abeilles (Apidés), c’est 260 espèces, dont 45 de bourdons, les bourdons étant des abeilles au sens strict. La super-famille des abeilles, c’est 970 espèces en France et 20 000 dans le monde. La bio-diversité, ce n’est pas quelques bestioles, c’est la diversité génétique des espèces.
La diversité génétique des abeilles se nourrit
de la diversité génétique des végétaux
La diversité se nourrit de la diversité, et non d’un champ de colza ou de tournesol à perte de vue. Certes, c’est superbe sur le plan visuel ou photographique, mais catastrophique sur le plan de la bio-diversité. Par ailleurs, lorsqu’une espèce est domestiquée, elle se décline en races pour les animaux et en variétés pour les végétaux. Par exemple, le maïs se décline en plusieurs milliers de variétés selon les utilisations et les terroirs… Pour les animaux, c’est moins de 350 races pour les chiens, 400 pour les chevaux.
Biodiversité et écosystèmes,
des mots-valises
Un mot-valise naît de la fusion de deux mots, mais sans nécessairement en garantir le même sens. Par exemple, l’expression agriculture permanente est devenue en 1978 la perma-culture, puis en 1988 la permaculture. En rompant ses amarres agricoles, le mot a pris une dimension idéologique. Idem pour le mot écosystème, créé en 1935 de la contraction des mots ecological system, et qui désigne aujourd’hui également un système économique à l’exemple de l’écosystème du tourisme.
Idem pour l’agriculture ou le développement durable dont la source est anglaise : sustainable development. Sustainable, soutenable, pour répondre aux besoins du présent sans compromettre ceux des générations futures. Or, le mot durable est très flou, car il indique seulement la capacité à durer dans le temps sans en préciser la durée, tandis que soutenable relie ce temps à l’environnement et aux ressources naturelles. Par exemple, les murs d’une maison soutiennent le toit, et le toit garantit la durée de vie des murs lorsque les matériaux sont naturels.
Quant au mot biodiversité, né de diversité biologique, il désigne pour l’opinion publique quelques espèces phares parmi la dizaine de millions qui peuple la Terre. De ce point de vue, ce mot colporte une idée qui menace la diversité biologique des buveuses de nectar. La mort est uniforme, la vie est diversité.
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